Anette Bergström
Après une allée bordée d’arbres et entourée de prairies où des chevaux pâturent, je rencontre la mère, en bikini, qui fait du jardinage. Dans une écurie en contre-bas, un énorme étalon écossais est ferré par le père, en sueur, les mains blessées et maculées de sang. Le cheval bande avec une élasticité impressionnante, son engin est tacheté de brun et de rose, comme la plus délicate des distinctions. Son maître est un Apollon bien musclé et c’est tout de même un peu bizarre de se trouver là, devant un tel spectacle, avec des gens que je ne connais ni d’Eve ni d’Adam.
J’entre dans la maison. A mon grand étonnement, l’intérieur est des plus cossu. Une cuisine bleue et jaune, un salon chinois avec des colonnes et des poupées anciennes, des tableaux et des meubles de bois laqué avec des incrustations nacrées ; on se croirait dans un restaurant de l’Avenue de Choisy.
La femme enfile un short ; j’aurais préféré la prendre en petit maillot. Elle n’est ni belle ni très présente. A la cuisine, je photographie le chat, les fillettes qui passent à toute vitesse et à l’étage, le gamin dans un grand divan face à la télévision. Dans une chambre d’ado, un décor oriental, avec poissons rouges et rideaux romantiques de soie bleue. Les murs sont couverts de prix, de trophées et de coupes hippiques. La mère me dit que les quarante chevaux sont montés tous les jours, que ses enfants gagnent tous les concours, qu’ils ont la passion des courses. Un exemple de transmission, admirable et outrancier.